Un tératogène est une substance, un organisme ou un procédé qui peut avoir des conséquences néfastes sur le fœtus s’il y est exposé au cours de la grossesse. Les agents tératogènes peuvent être de natures multiples. De même, les conséquences pour le fœtus sont très variables selon l’agent en question et selon la période de la grossesse à laquelle le fœtus a été exposé.
Qu’est-ce qu’un agent tératogène ?
Un agent est dit tératogène lorsqu’il est susceptible de provoquer des malformations congénitales chez des enfants exposés à cet agent in utero au cours de la grossesse. Les agents tératogènes peuvent être de différentes natures : chimique (médicament, produit chimique) ; physique (rayonnement) ; biologique (infection).
L’effet tératogène dépend étroitement de la nature de l’agent tératogène, mais aussi de la période de la grossesse à laquelle le fœtus est exposé :
- La période péri-implantatoire (15 premiers jours de la grossesse) est souvent caractérisée par la loi dite du « tout ou rien ». Soit l’exposition à l’agent tératogène provoque une fausse couche, soit l’embryon poursuit son développement et le risque de malformations congénitales à la naissance est minime.
- La période embryonnaire (jusqu’aux 3 mois de grossesse) correspond au développement des différents organes de l’embryon. Cette période est la plus sensible au risque tératogène, qui est alors maximal.
- La période fœtale et périnatale (jusqu’à l’accouchement) est marquée par la maturation des organes et la différenciation des organes sexuels. Le risque tératogène devient plus faible, mais le risque fœtotoxique (intoxication de l’embryon par une substance chimique) s’accroît car la barrière placentaire laisse passer de plus en plus de substances.
Bon à savoir : les malformations congénitales touchent environ 2 % des bébés, quelle que soit leur origine. Selon la nature de l’agent tératogène, les malformations congénitales sont variables. Tous les agents tératogènes et tous les mécanismes tératogènes ne sont pas encore totalement connus.
Tératogène : médicaments à risques pendant la grossesse
Parmi les agents tératogènes les mieux connus, figurent plusieurs médicaments. Si certains médicaments peuvent être pris sans risque tout au long de la grossesse, un effet tératogène est connu pour de nombreux autres.
À noter : suite aux dispositions du décret n° 2017-550 du 14 avril 2017, des pictogrammes « femmes enceintes » sont apposés sur les boîtes de médicaments à risque fœtotoxique ou tératogène à compter du 17 octobre 2017. Le pictogramme avec un cercle rouge barré et une silhouette de femme enceinte à l'intérieur correspond à une interdiction totale d'utiliser le médicament pendant tout ou partie de la grossesse. Le pictogramme avec un triangle rouge et une silhouette de femme enceinte recommande de ne pas utiliser le médicament pendant la grossesse, sauf en l'absence d'alternative thérapeutique.
Médicaments tératogènes
Le tableau ci-dessous répertorie les médicaments tératogènes les plus connus à ce jour. Ces listes peuvent être mises à jour si de nouveaux effets tératogènes sont mis en évidence, suite à la prise de médicaments chez la femme enceinte. Elles ne sont donc pas exhaustives.
Proscrits pendant la grossesse | Utilisables pendant la grossesse en cas de nécessité médicale et avec surveillance prénatale |
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Acide valproïque (le valproate et tous ses dérivés) ; isotrétinoïne par voie orale ; mycophénolate ; tériflunomide (Aubagio®) ; thalidomide ; antimitotiques (méthotrexate, cyclophosphamide, etc.) ; prucalopride (Resolor®, neuroleptique autorisé dans la constipation chronique) ; thiocolchicoside (Miorel®, un myorelaxant) ; topiramate (antiépileptique) ; prégabaline. |
Lithium ; carbimazole ; anti-coagulants oraux - anti-vitamines K (warfarine, acénocoumarol, fluindione) ; carbamazépine (uniquement si le bénéfice est jugé supérieur aux risques, après un examen attentif des alternatives thérapeutiques disponibles) ; phénobarbital ; hydroxychloroquine (Plaquenil®, indiqué chez l’adulte dans la polyarthrite rhumatoïde, le lupus érythémateux, les lupus systémiques et les lucites). |
Bon à savoir : plusieurs études scientifiques suggèrent l’existence d’un effet tératogène de certains antidépresseurs : les inhibiteurs spécifiques de recapture de la sérotonine (ISRS). À ce jour, ces médicaments ne sont pas classés dans les médicaments tératogènes mais les enfants qui ont été exposés in utero aux ISRS présenteraient des excès de malformations cardiaques, de pathologies périnatales et de troubles du développement.
Médicaments fœtotoxiques
Certains médicaments sont contre-indiqués au cours de la grossesse, alors qu’ils ne sont pas tératogènes mais fœtotoxiques. Ils n’induisent pas de malformations congénitales, mais des troubles métaboliques chez le fœtus ou à la naissance.
Il s’agit notamment :
- des anti-inflammatoires non stéroïdiens (ibuprofène, kétoprofène, nimésulide, etc.) ;
- des inhibiteurs de l’enzyme de conversion et antagonistes de l’angiotensine II, des médicaments prescrits dans le traitement de l’hypertension artérielle (captopril, énalapril, losartan, etc.).
Tératogène : précautions à prendre pendant la grossesse
Pour prévenir tout risque tératogène, les femmes enceintes doivent, dès la connaissance de leur grossesse, prendre quelques précautions :
- Ne jamais prendre de médicaments sans avis médical ou pharmaceutique, même des médicaments vendus sans ordonnance.
- Informer tous les professionnels de santé en cas de grossesse.
- Prévenir son médecin en cas de prise accidentelle d’un médicament tératogène.
Il est généralement recommandé aux femmes enceintes atteintes de pathologies chroniques de prévenir leur médecin de tout projet de grossesse. En effet, cette initiative permet au médecin d’anticiper tout risque et d’adapter le traitement pour limiter au maximum le risque pour le fœtus. Il s'agit en effet d'évaluer le rapport bénéfice-risque du traitement.
Dans tous les cas, il ne faut jamais interrompre un traitement sans avis médical.
Par ailleurs, certains médicaments peuvent persister de 8 mois à 2 ans dans l’organisme même après l’arrêt du traitement. C'est par exemple le cas dutériflunomide (Aubagio®, Sanofi), un des traitements de la sclérose en plaques. Ainsi, en cas de désir de grossesse chez une patiente sous tériflunomide, ou de survenue d’une grossesse non planifiée, le traitement par Aubagio® doit non seulement être arrêté, mais il doit également s'accompagner d'une procédure d'élimination accélérée (protocole spécifique à base de colestyramine ou de charbon actif pendant 11 jours).
Source : ANSM (Agence nationale de Sécurité du Médicament).
Autres agents qui ont un effet tératogène
Les médicaments ne sont pas les seuls agents tératogènes. De nombreuses substances chimiques, physiques ou biologiques peuvent avoir un effet tératogène. L’exposition à un agent tératogène ne signifie pas obligatoirement que l’enfant présentera une malformation congénitale mais qu’il a un risque de présenter une malformation congénitale.
Parmi les agents tératogènes non médicamenteux, nous pouvons citer les plus connus :
- Les rayonnements comme les rayons X des radiographies ou des scanners. Ces examens sont ainsi limités au maximum au cours de la grossesse, particulièrement au cours du premier trimestre de grossesse, sauf en cas de nécessité médicale.
- Les métaux lourds comme le mercure peuvent entraîner des malformations congénitales, notamment au niveau du cerveau. Il est donc recommandé aux femmes enceintes de limiter leur consommation de poissons à deux rations par semaine pour limiter les risques d’exposition aux métaux lourds.
- L’alcool augmente le risque de lésions cérébrales ou de malformations graves, en particulier au niveau du cœur et des yeux. Le risque tératogène de l’alcool dépend de nombreux facteurs fœtaux et maternels (dose d’alcool, nombre d’expositions du fœtus à l’alcool, régime alimentaire de la mère, prédisposition génétique, etc.). Dans tous les cas, il est recommandé une abstention totale d’alcool tout au long de la grossesse et de l’allaitement.
- Les infections pendant la grossesse. Plusieurs agents pathogènes sont connus pour être tératogènes, par exemple la rubéole ou la toxoplasmose. Le dernier exemple connu est le virus Zika qui provoque des microcéphalies chez les nourrissons nés de mères infectées. L’effet tératogène des agents pathogènes n’est pas toujours systématique et dépend fortement du moment de la grossesse où la mère est infectée. Dans certains cas, il est possible de supprimer le risque par une vaccination avant la grossesse (cas de la rubéole).
Tératogène : infections de la grossesse et risque tératogène
Effet tératogène possible | Effet tératogène potentiel | Aucun effet tératogène connu |
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Cytomégalovirus (CMV) ; Rubéole (virus) ; Varicelle (virus) ; Syphilis (bactérie) ; Toxoplasmose (parasite). |
Parvovirus ; Echovirus ; virus Coxsackie ; VIH ; maladie de Lyme (bactérie) ; grippe (virus) |
Tératogène : s'informer sur les risques
En France, il existe un centre public et indépendant de référence sur les agents tératogènes, le CRAT. Ce service d’information sur les risques des médicaments, des vaccins, des radiations et des dépendances informe sur les effets tératogènes au cours de la grossesse, mais aussi les risques au cours de l’allaitement.
Initialement destiné aux professionnels de santé, le site internet du CRAT est accessible à tous et consultable en cas de besoin.
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