Les médicaments antibiotiques sont utilisés pour combattre des infections dues à des bactéries qui peuvent être, soit sensibles, soit résistantes à l'actio et n antibiotique. La résistance à un antibiotique ou antibiorésistance est la capacité d'une bactérie à se multiplier malgré la présence de cet antibiotique.
Certaines bactéries multirésistantes (BMR) sont insensibles à l'action de plusieurs catégories d'antibiotiques et rendent difficile le traitement de graves infections nosocomiales (contractées à l'hôpital) ou communautaires (contractées hors d'un établissement de santé).
Depuis les années 1980, la forte augmentation de ces bactéries multirésistantes, préoccupe les autorités de santé de tous les pays. Selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) : « la résistance aux antibiotiques constitue aujourd'hui l'une des plus graves menaces pesant sur la santé mondiale. Elle peut frapper n'importe qui, à n'importe quel âge, dans n'importe quel pays ».
Alors d'où vient cette résistance aux antibiotiques ? Quels en sont les dangers et quelles mesures peuvent diminuer les risques ? Toutes les réponses dans notre article.
Résistances aux antibiotiques : mécanismes de la résistance bactérienne
Certains types de bactéries sont naturellement résistants à certains antibiotiques, on parle alors de résistance innée ou naturelle. D'autres bactéries, normalement sensibles, peuvent devenir subitement résistantes, c'est la résistance acquise.
La résistance acquise, qui concerne toutes les espèces de bactéries, peut résulter de deux mécanismes :
- Soit d'une mutation génétique du chromosome d'une bactérie, en réaction à l'effet délétère de l'antibiotique. La bactérie transmet ensuite cette mutation à sa descendance.
- Soit une acquisition du matériel génétique résistant (plasmide) d'une autre bactérie qui peut être de la même espèce ou d'une espèce différente.
La présence d'un antibiotique dans l'environnement d'une bactérie a tendance à favoriser le développement d'une souche bactérienne résistante : en tuant les bactéries sensibles, les antibiotiques laissent plus de place aux bactéries résistantes qui se multiplient librement. Ce qui peut aggraver l’infection initiale.
Au cours du XXème siècle, la formation de bactéries résistantes à plusieurs antibiotiques (BMR) a été favorisée par l'utilisation massive et parfois mal appropriée des antibiotiques en médecine humaine ou vétérinaire, mais aussi dans l'alimentation des animaux d'élevage pour améliorer leur croissance et en agriculture pour soigner des plantes.
Dangers de la résistance bactérienne aux antibiotiques
Chaque année, l'antibiorésistance provoque 700 000 morts dans le monde, dont 25 000 en Europe ; ce bilan ne cesse de croître avec l'évolution des migrations et des déplacements de population.
La France est un des pays européens qui consomme le plus d'antibiotiques et où la fréquence d'antibiorésistance est la plus grande (taux record en Europe). En effet, selon Santé publique France, « la consommation d'antibiotiques en France demeure 30 % supérieure à la moyenne européenne ». En parallèle, le poids des infections à bactéries multirésistantes en santé humaine en France s'établit à environ 125 000 infections et 5 500 décès (ainsi, à elle seule, la France compte un cinquième des décès recensés dans l'ensemble de l'Europe !).
En raison de la faible immunité des malades, la fréquence des contaminations par des bactéries multirésistantes est plus élevée en milieu hospitalier et dans les EHPAD, mais des cas d'infections très résistantes apparaissent de plus en plus souvent en dehors de l'hôpital.
À noter : les infections urinaires figurent parmi les principales causes de prescription d'antibiotiques, parfois à mauvais escient.
Certaines BMR, comme le staphylocoque doré, le pneumocoque, le pseudomonas aeruginosa et des entérobactéries, sont aujourd'hui responsables d'infections sévères et difficiles à soigner voire incurables.
Bon à savoir : en France, le taux de résistance aux antibiotiques est de 50 % pour la pénicilline et de 28 % pour la méticilline utilisées respectivement contre le pneumocoque et le staphylocoque doré, qui constituent les principales bactéries à l'origine des infections nosocomiales. Mais toutes bactéries confondues, ce sont les fluoroquinolones qui sont les antibiotiques les plus fortement responsables d'une augmentation des résistances.
Résistance aux antibiotiques : quelles mesures pour diminuer les risques ?
Pour se prémunir de l'augmentation des résistances bactériennes et préserver le plus longtemps possible l’efficacité des antibiotiques disponibles, il est nécessaire de réserver l'usage des antibiotiques aux situations où elles sont vraiment indiquées en respectant la dose, la posologie, la bonne durée de traitement, et de prévenir les infections afin d'éviter les traitements.
C'est dans cette optique, par exemple, que la Haute Autorité de santé (HAS) a établi des recommandations de bonne pratique visant à améliorer la prise en charge des infections urinaires à entérobactéries chez les femmes. Il s'agit de favoriser les antibiogrammes ciblés et d'utiliser des antibiotiques à spectre étroit.
Bon à savoir : Antibio'Malin est un espace en ligne qui a pour objectif d'améliorer la connaissance des infections courantes et des traitements antibiotiques et ainsi de prévenir le phénomène d'antibiorésistance.
Certains membres de l’Union européenne, à l’instar de la France, de la Suède ou de l’Allemagne, ont élaboré au cours des dernières années des stratégies et des plans d’action nationaux pour lutter contre l'antibiorésistance. Les principales mesures de ces plans concernent :
- La sensibilisation, des professionnels de santé et de leurs patients, à l'importance de diminuer la prescription (-31 % chez les enfants entre 2009 et 2018) et d'améliorer l'utilisation des antibiotiques par des campagnes d'information comme « les antibiotiques c'est pas automatique ».
- Les recommandations de règles hygiéno-diététiques simples (lavage des mains, utilisation de solutions hydro-alcooliques, matériel de soin à usage unique...).
- La promotion des vaccinations préventives contre les infections.
- Le renforcement des techniques d'hygiène pour la protection des malades en milieu hospitalier et l'amélioration de la lutte contre les maladies nosocomiales (l'utilisation d'antibiotiques qui sélectionnent des bactéries résistantes aux traitements constitue un des facteurs aggravants des maladies nosocomiales).
- Le renforcement des systèmes de surveillance des résistances et de la consommation d’antibiotiques en médecine humaine et vétérinaire.
La Haute Autorité de santé (HAS) vient de mettre en ligne de nouvelles recommandations pour une bonne utilisation des antibiotiques aux cours des infections bactériennes courantes en ville. Elles se présentent sous forme de fiches synthétiques, préconisant le choix et les durées d'antibiothérapie les plus courtes possible pour chaque cas, s’inscrivant ainsi dans le cadre du plan national pour la maîtrise de l’antibiorésistance.
Des recherches sont en cours pour mettre au point de nouvelles molécules antibiotiques capables de détruire les bactéries résistantes et pour développer d'autres thérapeutiques antibactériennes comme la phagothérapie (utilisation de virus tueur de bactérie).
Bon à savoir : en contradiction avec les recommandations de l'OMS, selon lesquelles un traitement antibiotique doit être respecté jusqu'au bout, certains experts affirment au contraire qu'arrêter le traitement dès que le patient se sent mieux permettrait de lutter contre l'antibiorésistance.