
Les anthracyclines sont des médicaments de chimiothérapie, elles sont utilisées seules ou en association dans le traitement de nombreux cancers de l’enfant et de l’adulte.
Ces médicaments présentent des effets indésirables sur le cœur et un traitement par anthracycline nécessite donc une surveillance cardiaque étroite à la fois au cours du traitement et durant les mois et les années à suivre. Le point dans la suite de notre article.
Mode d’action des anthracyclines
Découvertes dans les années 60, les anthracyclines sont des médicaments de chimiothérapie, appartenant à la classe des agents intercalants et inhibiteurs de la topoisomérase II. Elles sont toutes issues de champignons microscopiques (Streptomyces).
Les anthracyclines agissent sur les cellules cancéreuses par deux mécanismes :
- Ces molécules viennent se loger au niveau des brins d’ADN pour former un complexe avec l’ADN et la topoisomérase II (enzyme impliquée dans la transcription de l’ADN, c’est-à-dire dans la traduction de l’information contenue dans les gènes en protéines fonctionnelles). La formation de ce complexe aboutit au blocage de la transcription et concourt ainsi à limiter la division des cellules cancéreuses et l’extension des tumeurs.
- Les anthracyclines provoquent par ailleurs la formation de radicaux libres d’oxygène, à l’origine d’un pouvoir oxydant délétère pour les cellules cancéreuses.
Bon à savoir : dans le traitement des cancers, les anthracyclines sont souvent associées à d’autres médicaments de chimiothérapie. La posologie et la durée du traitement sont définies au cas par cas en fonction du type de cancer, de l’état de santé du patient et de l’évolution de sa tumeur. Toutes les anthracyclines sont administrées par voie veineuse, en perfusions rapides. Certaines anthracyclines existent sous forme encapsulée dans des gouttes lipidiques, permettant une meilleure pénétration dans certains tissus cancéreux.
Différents types d'anthracyclines
Plusieurs anthracyclines ont été découvertes et sont utilisées en thérapeutique. Les anthracyclines de première génération :
- la daunorubicine, la première découverte, indiquée dans les leucémies, les lymphomes et certaines formes de sarcome de Kaposi ;
- la doxorubicine, la plus utilisée, indiquée dans le traitement de nombreux cancers :
- les carcinomes du sein ;
- les sarcomes des os et des parties molles ;
- la maladie de Hodgkin et les lymphomes non hodgkiniens ;
- les tumeurs solides de l'enfant ;
- les cancers du poumon ;
- les leucémies aiguës et chroniques ;
- les cancers de la vessie ;
- les cancers de l'ovaire ;
- le cancer de l'estomac.
Mais également les anthracyclines de deuxième génération :
- l’épirubicine, qui remplace de plus en plus la doxorubicine dans l’ensemble de ses indications thérapeutiques ;
- la pirarubicine ;
- l'idarubicine, utilisée dans le traitement des leucémies aigües ;
- la zorubicine ;
- l'aclarubicine.
Bon à savoir : la recherche continue pour développer de nouvelles anthracyclines, avec un effet anti-cancéreux optimisé et une toxicité cardiaque amoindrie.
Cardiotoxicité des anthracyclines
Les anthracyclines agissent par deux modes d’action, l’un d'eux étant la production de radicaux libres d’oxygène. Si la création de ce pouvoir oxydant contribue à l’effet anti-cancéreux des anthracyclines, elle entraîne aussi des effets néfastes notamment au niveau cardiaque.
La toxicité cardiaque des anthracyclines touche 10 à 50 % des patients et se manifeste principalement sous deux formes :
- Une toxicité aiguë apparaît dans les heures suivant l’injection d’anthracycline :
- une toxicité réversible, qui n’entrave pas la poursuite du traitement ;
- des troubles du rythme cardiaque (tachycardie, fibrillation auriculaire, allongement de l’espace QT).
- Une toxicité subaiguë survient à la suite du traitement, parfois longtemps après le traitement par anthracyclines :
- une cardiomyopathie chronique ;
- une péricardite ;
- une insuffisance cardiaque.
À noter : des facteurs de risque ont pu être identifiés et sont systématiquement recherchés avant la prescription d’un traitement par anthracycline. Le rapport bénéfice/risque est alors évalué au cas par cas en fonction de la gravité et du pronostic du cancer.
La toxicité cardiaque des anthracyclines dépend de la dose injectée mais elle est généralement cumulative, c’est-à-dire qu’elle s’accroît au fur et à mesure des prises. La durée des traitements par anthracycline doit donc rester limitée dans le temps.
La toxicité cardiaque des anthracyclines peut se manifester longtemps après le traitement, ce qui nécessite la mise en place d’une surveillance cardiaque régulière des patients (échocardiographie).
Quels sont les autres effets indésirables des anthracyclines ?
En dehors de leur toxicité cardiaque, les anthracyclines sont toxiques pour d’autres parties de l’organisme :
- une toxicité veineuse, limitée par l’utilisation des chambres implantables et la rapidité de la perfusion ;
- une toxicité cutanée en cas de fuite du médicament vers la peau au cours de la perfusion (extravasation), avec un risque d’escarre local ;
- une toxicité pour les muqueuses digestives ;
- une toxicité pour les cellules sanguines, affectant les globules rouges, les globules blancs et les plaquettes ;
- une toxicité sur la moelle osseuse avec un risque de leucémie aiguë myéloblastique à la suite d’un traitement de chimiothérapie incluant une anthracycline.